La qualification de non-professionnel du Comité Social Économique, au sens du code de la consommation, et son impact sur les contrats à tacite reconduction.

Le Comité Social Économique peut être amené à conclure des contrats avec des fournisseurs de biens ou des prestataires de services dans le cadre des missions qui lui sont confiées par la loi, y compris des contrats contenant une clause de tacite reconduction.

Dans ce cas, est-il considéré comme un professionnel ou un non-professionnel au sens du code de la consommation ?

Très logiquement, la Cour de cassation a exclu la qualification de “consommateur” s’agissant du C.S.E. puisque ne peut être considéré comme consommateur, qu’une personne physique alors que le C.S.E. est une personne morale.

En revanche, la réponse était moins évidente quant à la qualification de non-professionnel ou professionnel. En effet, si la loi Hamon du 17 mars 2014 avait pris le soin de définir le consommateur comme “toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale”, la notion de non-professionnel n’avait pas pour sa part, été définie par le législateur.

Ainsi, dans une affaire où le C.S.E. avait conclu un contrat tacitement reconductible avec un professionnel prestataire de services et avait résilié ce contrat après la date de reconduction tacite, la chambre commerciale de la Cour de cassation avait décidé que les dispositions du Code de la consommation précitées ne s’appliquaient pas s’agissant d’un contrat qui avait un rapport direct avec l’activité professionnelle du C.S.E. Pour la chambre commerciale, le C.S.E., dans le cadre de la gestion des ASC, avait donc contracté en tant que professionnel févr. 2016 no 14:25046).

Depuis cette décision de la chambre commerciale de la Cour de cassation qui avait considéré le C.S.E. comme un non-professionnel puisqu’il n’exerçait pas d’activité à but lucratif.

Il est retenu par la jurisprudence, la définition du non-professionnel est la suivante : “Toute personne morale qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole” .

C’est dans ce contexte que le 15 juin 2016, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, anticipant la définition du non-professionnel intégrée au Code de la consommation à compter du 1er juillet 2016, a revu son analyse, et qualifié de non professionnel le Comité Social Économique lorsqu’il conclut un contrat dans le cadre de la gestion des ASC.

Pour la première chambre civile, du Code du travail disposant que le Comité Social Économique assure, contrôle ou participe à la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établies dans l’entreprise prioritairement au bénéfice des salariés, de leur famille et des stagiaires, la gestion des ASC par le C.S.E. relève d’une mission légale et non d’une activité professionnelle. Lorsque le C.S.E. conclut de tels contrats avec des professionnels, il ne fait qu’exercer sa mission légale et n’agit pas à des fins entrant dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole. (Cass. 1re civ., 15 juin 2016, no 15-17.369).

D’après l’article L. 136-1 du Code de la consommation, tout professionnel prestataire de services qui a conclu avec un consommateur ou un non-professionnel un contrat à tacite reconduction doit l’informer par écrit, avant l’arrivée du terme, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat. II doit le faire au plus tôt 3 mois et au plus tard 1 mois avant la fin de la période dont dispose le consommateur ou le non-professionnel pour faire savoir qu’il ne souhaite pas se réengager. Si le professionnel ne respecte pas cette formalité, son cocontractant peut, à tout moment, mettre un terme au contrat tacitement reconduit. Autrement dit, la tacite reconduction ne joue plus.

En leur reconnaissant la qualité de non professionnels, l’arrêt du 15 juin 2016 permet aux CSE de se prévaloir de l’article L. 136-1 du code de la consommation pour échapper à des condamnations qui pouvaient atteindre des montants très importants, correspondant souvent à deux années de prestations non réalisées, lorsqu’ils souhaitaient mettre fin à un contrat de prestation de services ou tout simplement changer de prestataire, avaient oublié de procéder dans les délais prescrits à la dénonciation du contrat conclu initialement.

Ainsi, si par exemple, un Comité Social Économique décidait de changer de prestataire et qu’il oubliait de dénoncer en temps voulu le contrat initial, il devait payer deux fois la même prestation : avec le nouveau prestataire (pour une prestation réelle) et avec l’ancien (sans la moindre prestation). Désormais, les prestataires devront donc attirer l’attention du Comité Social Économique sur l’arrivée proche du terme de la dénonciation sous peine de voir leurs contrats dénoncés à tout moment, ce. qui permettra tout d’abord et en pratique de limiter un grand nombre d’oublis.

La question se pose notamment lorsque le C.S.E. conclut un contrat avec un expert-comptable, qu’il s’agisse de se faire assister dans ses missions économiques et professionnelles ou qu’il lui confie l’établissement de ses propres comptes ?

Il n’agit pas davantage à des fins entrant dans le cadre d’une activité professionnelle entendue comme activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole qui lui serait propre “Le Comité Social Économique ne vend rien, ne produit rien, ne créée rien” et diriger ou être membre d’un C.S.E. ne s’apparente pas à l’exercice d’un métier ou d’une profession.

Le C.S.E. est composé de salariés élus non rémunérés pour leurs mandats.

II convient de rappeler que le C.S.E. est composé de salariés élus :

  • qui ne perçoivent pas la moindre rémunération dans le cache de leurs mandats,
  • qui n’ont aucune compétence professionnelle particulière,
  • qui sont élus pour une durée limitée, de sorte qu’en l’absence de rappel par le prestataire sur l’arrivée de l’échéance, d’un renouvellement de contrat, il est tout à fait possible (voire courant en pratique) qu’il y ait de nouveaux élus n’ayant aucune connaissance des termes approfondis (et parfois peu clairs) des contrats souscrits par leurs prédécesseurs, surtout lorsque ceux-ci n’appartiennent pas à la même majorité syndical.

Il faut également rappeler que le Comité Social Économique trouve d’abord et avant tout son origine dans l’article 6 du préambule de la Constitution, selon lequel “tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises”.

II faut admettre que les C.S.E. étant donné leur nature atypique restent difficiles à classer dans la nouvelle définition du non-professionnel telle que définie par Code de la consommation, à savoir : “Toute personne morale qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole”.

En effet, en aucune manière ils n’ont d’activité que ce soit commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.

De ce fait, le principe de prudence prévaut, et l’ensemble des acteurs préconisent de considérer le C.S.E lorsqu’il agit dans le cadre du budget des Attributions Économiques et Professionnelles comme un consommateur.