La suppression de la limite de trois mandats consécutifs pour les élus de CSE : une réforme en marche
La limitation à trois mandats consécutifs pour les élus des Comités Sociaux et Économiques (CSE) pourrait bientôt appartenir au passé. Grâce à un Accord National Interprofessionnel (ANI) signé le 14 novembre 2024, les partenaires sociaux ont demandé officiellement au Gouvernement de supprimer cette mesure controversée. Cette avancée, attendue depuis longtemps par les organisations syndicales, s’inscrit dans un contexte où le dialogue social est appelé à évoluer pour répondre aux défis contemporains.
L’Origine de la Limitation des Mandats
Introduite par les ordonnances Macron en septembre 2017, la limitation à trois mandats consécutifs visait à encourager le renouvellement de la représentation du personnel. Cette mesure, inscrite à l’article L. 2314-33 du Code du travail, comprenait toutefois des exceptions :
- Elle ne s’applique pas aux entreprises de moins de 50 salariés.
- Elle peut être écartée dans les entreprises de moins de 300 salariés si un protocole d’accord préélectoral (PAP) le prévoit.
Les partisans de cette limitation estimaient qu’elle favorisait un dialogue social dynamique. Cependant, pour les syndicats, cette disposition affaiblissait la représentation des salariés, en limitant la transmission des compétences et en réduisant l’implication des élus expérimentés.
Un Contexte Social et Politique Favorable à la Réforme
Sous l’impulsion du Premier ministre Michel Barnier, les négociations ont été relancées dans le cadre d’une série de discussions sociales. Initialement, le dialogue social ne figurait pas à l’agenda. Cependant, les syndicats, ont saisi l’opportunité pour remettre sur la table la question de la limitation des mandats CSE, qu’ils dénonçaient depuis plusieurs années.
Les syndicats ont notamment mis en avant les défis croissants auxquels font face les élus :
- Cumul des missions issues des anciens délégués du personnel, des comités d’entreprise et des CHSCT.
- Gestion des problématiques complexes comme la santé, la sécurité et les conditions de travail, amplifiées par la transformation des CSE.
Cette pression a conduit à la conclusion d’un Accord National Interprofessionnel dans la nuit du 14 au 15 novembre 2024.
Le Contenu de l’Accord National Interprofessionnel
L’ANI du 14 novembre 2024 marque une étape clé dans l’évolution du dialogue social. Ses principales dispositions sont :
Article 1 : Valorisation des Parcours Syndicaux
Une négociation spécifique s’ouvrira en 2025 pour renforcer la reconnaissance des compétences acquises lors des mandats syndicaux. Actuellement, ces compétences peuvent être attestées par un certificat basé sur six blocs de compétences introduits en 2018, mais ce dispositif reste peu utilisé. Les entretiens de début et de fin de mandat, obligatoires dans certaines conditions (entreprises de plus de 2 000 salariés ou délégation représentant 30 % du temps de travail), sont jugés trop formels et peu efficaces.
Article 2 : Suppression de la Limitation des Mandats Consécutifs
Le texte demande explicitement la suppression de la limitation des mandats CSE dans le Code du travail, soulignant qu’elle est contraire à l’objectif de préserver l’expérience et les compétences acquises. Cette mesure vise à renforcer la qualité du dialogue social en permettant aux élus les plus expérimentés de continuer à exercer leurs fonctions.
Article 3 : Nécessité d’une Transposition Législative
Pour être applicable, l’accord doit être intégré dans la législation par un projet ou une proposition de loi.
Du côté du Gouvernement, les réactions sont encourageantes. La ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a déclaré :
« Cette décision va dans le sens de la dynamisation du dialogue social dans toutes les entreprises. »
La porte-parole du Gouvernement, Maud Bregeon, a également souligné que la méthode du dialogue social promue par le Premier ministre portait ses fruits, écartant ainsi toute reprise en main par l’exécutif.
Un Retour sur les Enjeux de la Réforme
L’importance de l’expérience des élus CSE
La limitation des mandats était perçue comme une entrave à la continuité et à la transmission des savoir-faire essentiels. Les élus jouent un rôle stratégique dans :
- La gestion des problématiques économiques et sociales.
- La représentation des salariés face aux transformations écologiques, numériques et organisationnelles.
Un enjeu de reconnaissance des compétences syndicales
En parallèle, la réforme prévoit une meilleure valorisation des parcours syndicaux, avec des dispositifs renforcés pour faciliter l’évolution professionnelle des élus.
Historique des réformes précédentes
Le rapport parlementaire du 25 février 2024 avait inquiété les syndicats en suggérant une réduction des moyens des CSE dans les entreprises de moins de 250 salariés. Cette menace a été écartée grâce à la mobilisation des partenaires sociaux.
Quelles Suites pour cet Accord ?
L’ANI doit maintenant être ratifié par les syndicats signataires avant d’être transposé dans une loi. Les prochaines semaines seront cruciales, avec une décision attendue de la CGT et une éventuelle proposition de loi pour modifier le Code du travail.
Si cette réforme est adoptée, elle marquera une avancée significative pour les élus de CSE, en levant une contrainte jugée contre-productive et en renforçant la qualité du dialogue social dans les entreprises.
Conclusion : Vers un Dialogue Social Plus Solide
La suppression de la limite de trois mandats consécutifs pour les élus de CSE représente une opportunité majeure pour le dialogue social en France. En valorisant l’expérience et les compétences des représentants du personnel, cette réforme promet de renforcer leur rôle face aux défis économiques et sociaux de demain.